Ce projet de livre s’est développé autour d’un objet usuel suscitant chez moi diverses réflexions. Gants pour travailleurs « made in China « retrouvés en paquets dans toutes les quincailleries. Mondialisation oblige, tout se fabrique à moindre coût en Chine au détriment des travailleurs d’ici. L’objet devient contradictoire : gants de travailleur (faits en Chine) versus chômeurs d’ici.
Ces cent cinquante lapins ont été faits au rythme d’environ un par jour. En plus de ce qui a été écrit sur ma motivation, une chose nouvelle est apparue. Inconsciemment, le lapin fabriqué tel jour révèle quelque chose de mon état à ce moment, de mon regard sur le monde. Journal de bord.
Cette publication n’est pas un catalogue, mais un objet où les images et les mots vont s’entrecroiser, non sans chocs, où un soin particulier est apporté à la façon de « donner à voir ». Ne jamais oublier que ces lapins sont en quelque sorte des mutilés. Sous une première apparence candide, naïve et doucereuse, il a fallu couper des doigts (ceux des gants), coudre, raccommoder (ce qui est non sans rappeler certaines conditions de travail dans les manufactures).
Ces lapins-nounours sont des lapins cicatrisés. Les mots en seront d’autant plus aiguisés. Des histoires à tirer par les oreilles !