Cette publication montre en image l’exposition Dans l’ombre de l’artifice présentée au Centre SAGAMIE pendant le moment fort de la pandémie de COVID-19. En raison de la fermeture des lieux de diffusion, cet événement n’a pratiquement pas été vu du public. L’exposition ayant plutôt existé en image pour un visionnement presque uniquement à l’écran, cette nouvelle réalité virtuelle a fait naître, dans la tête des artistes, une réflexion sur la pertinence de voir les œuvres d’art et leur matérialité. L’auteur Pierre-Marc Asselin signe un texte où la fiction et la réalité nous font perdre nos repères. Un livre mettant à l’avant-scène la créativité sur fond de critique artistique et d’angoisse numérique.
Extrait Dans l’ombre de l’artifice :
Je sais : c’est une interrogation qui sonne comme une provocation. Mais le soir de novembre pandémique où elle m’est venue, j’avais froid. Mon thé, infusé trop longtemps, répandait l’amertume de ses tanins. J’étais encore une fois pris au piège devant l’écran, à exister pour des images. Mes « ami.e.s » exhibaient leurs dernières expérimentations formelles sur les réseaux. Dehors, un marcheur se laissait tirer par son chien noir, évoquant celui de Churchill à mes yeux, et je l’enviais de pouvoir sortir à cette heure. J’étais insensible à tout ce que je voyais : la fenêtre, l’écran, la police. Ça me laissait profondément indifférent. J’avais besoin de croire en quelque chose, et la question est venue comme une réponse : « Au fond, l’art contemporain a-t-il besoin d’être vu? »